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La génération Y : Qui dirigera?

Viva la familia!

Charles-Henri Amherdt observe d'ailleurs dans les salles de classe qu'il y a plus d'étudiantes enceintes qu'auparavant. «C'est une marque de confiance par rapport à l'avenir, dit-il; les jeunes n'attendent pas d'avoir un emploi avant de fonder une vie familiale.» Un comportement qui aurait été jugé risqué par les boomers, et encore plus par la génération X, qui a connu une grande précarité en début de carrière et qui a repoussé la venue du premier enfant.

Cet intérêt pour la famille se manifeste aussi dans le désir exprimé par les Y de maintenir un équilibre entre le travail et la vie familiale. Selon Jacques Charuest, cette préoccupation s'explique facilement : «Les Y ont vu leurs parents se donner entièrement au travail et ils ont connu les séparations matrimoniales qui en étaient parfois la conséquence.» Une réalité qui cause des maux de tête à des cabinets professionnels (avocats, comptables, etc.), qui ont de la difficulté à recruter de nouveaux associés. Être associé signifie travailler de longues heures, et plusieurs jeunes ne sont pas prêts à sacrifier leur vie de famille pour ça.

Lucie Mandeville, professeure au Département de psychologie de l'Université, observe elle aussi cette tendance. Elle-même de la génération des boomers, elle affirme : «Lorsque j'ai commencé, la culture du département était vocationnelle : on était prêt à donner beaucoup de temps pour son développement.» Aujourd'hui, elle observe que les aspirations personnelles et familiales ont pris beaucoup d'importance chez les étudiants et les jeunes professeurs. «Ils parlent plus de leurs besoins familiaux, dit-elle. Ils sont moins prêts à accepter des tâches supplémentaires et ils sont plus susceptibles de prendre congé pour s'occuper d'un enfant malade ou de leur propre santé.»

Au début, elle a vécu ce changement comme un choc des cultures. «Je me disais : “Ils ne veulent pas travailler, les jeunes!” Mais, après réflexion, j'ai conclu qu'ils avaient raison de penser que la vie, ce n'est pas que le travail. J'ai réalisé que je ne m'étais peut-être pas suffisamment occupée de mon garçon. Ils ont fait en sorte que je suis revenue vers ma famille.»

Ce désir de conjuguer de façon équilibrée travail et famille s'exprime même... avant que la famille existe! Adinson Brown affirme que certains de ses amis qui étudient en médecine choisissent leur spécialité en fonction des heures de travail escomptées. Par exemple, l'urgence et l'obstétrique ne sont pas très populaires parce qu'elles riment avec horaires irréguliers et imprévisibles. Adinson souhaite consacrer du temps à sa future famille. Pas question de travailler 70 heures par semaine : «Le travail, c'est important, mais la famille, c'est quand même ça qui reste et dont on est le plus fier.»